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Modification du contrat

Le contrat de travail ne peut pas imposer à l'avance le passage à un horaire de jour

Dans une affaire jugée le 14 novembre 2018, la Cour de cassation s’est penchée sur le cas d’une entreprise qui avait décidé de passer en horaire de jour des salariés travaillant jusqu’alors le soir ou la nuit. Les intéressés, qui avaient en conséquence perdu le bénéfice des primes de soir ou de nuit, contestaient la modification unilatérale de leur contrat de travail.

Il est vrai que le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit (et vice-versa) constitue une modification du contrat de travail et nécessite l’accord du salarié (cass. soc. 7 avril 2004, n° 02-41486, BC V n° 107).

Cependant, dans cette affaire, l’employeur avait cru pouvoir contourner cet écueil en rédigeant de façon très large les clauses relatives aux horaires de travail. Les contrats prévoyaient en effet des horaires de jour, de soir ou de nuit, ainsi que des horaires tournants et des horaires de fin de semaine. Puis ils indiquaient que le salarié relevait de l’un de ces horaires, tout en précisant qu’il pouvait être amené à en changer, en raison des nécessités de la production. L’employeur soutenait en conséquence que les horaires n’avaient pas été contractualisés, de sorte qu’il pouvait les modifier sans l’accord des salariés.

Sensible à cet argument, la cour d’appel avait estimé que, en effet, l’employeur était libre, en application de son pouvoir de direction, de modifier les horaires de travail et de réduire la rémunération en conséquence.

L’arrêt est naturellement cassé par la Cour de cassation, qui rappelle qu’une clause du contrat de travail ne peut permettre à l’employeur de modifier unilatéralement le contrat de travail. Dans cette affaire, il fallait donc faire abstraction des clauses par lesquelles l’employeur s’offrait la possibilité de modifier unilatéralement les horaires. Ne restaient alors que les clauses qui prévoyaient expressément que tel salarié était affecté à un horaire du soir ou tel autre à un horaire de nuit, avec le versement des primes correspondantes. L’employeur ne pouvait dès lors modifier cet horaire sans l’accord des intéressés.

D’aucuns noteront que les clauses de mobilité ou d’objectifs autorisent l’employeur à modifier certains éléments du contrat ou de la relation de travail de façon unilatérale (cass. soc. 10 juin 1997, n° 94-43889, BC V n° 210 ; cass. soc. 2 mars 2011, n° 08-44977, BC V n° 55). Cette affaire montre justement que ces hypothèses font figure d’exception et que, en règle générale, l’employeur ne peut pas s’autoriser à modifier unilatéralement le contrat de travail en dehors des cas prévus par les juges.

Enfin, il convient de rappeler que, postérieurement à cette affaire, les ordonnances Macron ont créé une exception notable au régime de la modification du contrat de travail, avec les accords « de performance collective », qui permettent aux entreprises d’imposer aux salariés des aménagements en matière d’organisation du travail, de rémunération ou de mobilité géographique ou professionnelle, « afin de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise ou en vue de préserver, ou de développer l’emploi » (c. trav. art. L. 2254-2).

Cass. soc. 14 novembre 2018, n° 17-11757 FSPB (1er moyen)

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